Bonjour Julien, présente-toi en quelques mots
Bonjour, je m’appelle Julien plus connu sous le nom de DeeJayJul, je suis né dans l’Ain l’équivalent du Mordor à la française, mais j’ai grandi et réside à Annemasse en Haute Savoie depuis 34 ans, une petite ville collée à Genève. Je suis devenue DJ en 1997 après un bref passage par le micro. DJ officiel du SwissSneaks Event depuis deux éditions, je représente aussi la marque Advita Wear. Mes loisirs sont les concerts et soirées Hip Hop, je fais des mixtapes. Je ne fais partie d’aucunes teams d’adorateurs de sneakers sur le web, mes autres passions sont la pêche, la geekance, les barbecues et j’aime refaire le monde avec mes amis, rester de ma famille, et passer de super week end.
Par quel biais es-tu venu à la sneaker (le sport, la curiosité du moment…)
C’est par le sport mais pas seulement, depuis mon premier voyage aux Etats Unis fin 89, j’ai de suite compris que la culture américaine était faite pour moi. Mon cousin était déjà DJ HipHop, mon père fan de funk. Je regardais Rapline et les clips de Public Enemy, en disant « Je veux ces baskets montantes », tout était fait pour que je baigne dedans. J’ai vu les finales NBA en 91 sur Canal +, Jordan contre Magic, et là grosse claque. Arrêt sur image sur les VHS qui tournent en boucle. Je m’intéresse à tout ce qui touche la NBA, j’analyse chaques chaussures que portent les joueurs sur toutes les photos, cartes, posters etc… En 92 avec l’avènement de la Dream Team je m’inscris au club de basket de ma ville, et me fais des amis qui sont d’ailleurs toujours les mêmes plus de 20 ans après. Entrée au collège et match de basket à chaque récréations, tournois Adidas StreetBall, Converse 3×3, les amis de l’école se mélangent avec ceux du club, on parle sneakers, on rêve d’avoir telles ou telles paires. Aujourd’hui je leur montre les rétros, et les souvenirs reviennent, le basket c’est ce qui à un moment nous a tous rassemblés.
Tu portes aux pieds une paire de Air Jordan VI Carmine CDP’ As-tu une histoire particulière avec cette paire ? Pourquoi ce choix? Qu’apprécies-tu dans ce modèle ?
C’est une paire mythique pour moi, tout autant que la VI Infrared, MJ a réalisé beaucoup de ses meilleurs actions en 91 avec ces dernières, et les photos de la communication autour de ce CW était magnifique . La seul rétro qu’il ai eu après l’original était celle Count Down Pack VI/XVII que j’ai loupé à sa sortie, j’ai mis un moment à la retrouver à un prix raisonnable. Une fois de plus on peut parler de la dernière rétro sortie 2014 et de la comparaison qualitative indéniable avec la CDP et l’OG, de l’oubli de la peinture noire sur l’intérieure avant de la midsole et du icy sole, mais si je n’avais pas eu la CDP, je porterai la 2014 aujourd’hui à mes pieds. La Jordan VI pour moi c’est emblématique, indémodable, le CW Carmine est unique.
Te souviens-tu de ta première paire?
Ma première paire je ne m’en souviens pas vraiment mais c’était une Adidas blanche avec les bandes bleues et rouge je devait avoir 4 ans, je l’ai vu sur une photo. La première paire que dont je me souvienne c’est une paire de Nike Novice Flight noire avec le Swoosh blanc, puis une air 180 orange et violette en 91 à défaut de ne pas pouvoir avoir une Jordan 6 car elle n’étais pas à ma taille. Ces premières paires c’est ma grand mère qui me les offrait, c’est elle qui m’a élevé, et c’est aussi elle qui m’a offert ma première Jordan été 92 pendant les JO de Barcelone où nous étions en vacances en Espagne… Je regardais les matchs avec les Jordan 7 à mes pieds! Mon père voyageait souvent aux USA, toutes les excuses était bonnes pour qu’il me ramène une paire, anniversaire, fête, Noël, bonnes notes, quitte à mentir sur ma taille pour avoir un modèle dispo, Air force Magnum, Air Raid 1, Ewing, je me souviens de chaque déballage de boites et même de l’odeur.
Es-tu un collectionneur ou un passionné ?
La passion amène forcement à la collection, je me définie plus comme un passionné, mon but étant d’acquérir les paires que je n’ai put avoir à l’époque et principalement celle que MJ et les joueurs des 90’s ont portées, les déviances de coloris sont des coup de coeur. La qualité n’est plus la même, nous le savons tous, mais je ne suis pas dans la brigade du shape ou des fachos de la sneakers, ça ressort je prend si ça me plait, les débats à rallonge sur les réseaux sociaux ne servent a rien, j’ai perdu assez de temps avec des finalités peu évolutives et des discours qui tournent en boucle, l’important c’est de se faire plaisir, acheter une paire la porter. C’est surtout une question financière aussi, le display se fait naturellement pour moi. Je ne me vois pas prendre une paire de 91 à 400 euros et la laisser dans la boite ou même sur une étagère. D’un autre coté acheter pour ne pas porter, c’est compréhensible, je le fais avec des figurines Saint Seiya ou DBZ je les mets dans une vitrine je ne joue pas avec. Tout est question de moyens aussi, si tu le fait c’est que tu le peux. Une collection ça part déjà d’une passion, tu peux être passionné en ayant 5 paires la suite viens au fil du temps.
Qu’est-ce que la culture sneaker selon toi ?
Je fais très attention avec ce mot, « culture sneaker ». Oui il y en a une pour les passionnés que nous ne sommes pas tous comme je l’ai dit avant, mais comme dans toutes cultures il y a forcement un problème d’accessibilité, et cette dernière c’est l’argent. Tu en as, tu as des sneakers c’est simple, contrairement à la culture générale par exemple où en allant à la bibliothèque tout les jours et n’avoir aucun livres à la maison tu acquiert des connaissances et un savoir. Je ne dis pas que tu ne peux pas être au courant ou être à fond dedans si tu n’en possèdes pas des masses, il y a internet et des sites comme le tiens qui amène ce coté plus historique et plus profond qu’un simple achat dans un shop. Mais un type qui gagne au loto et achète 80 000 euros de sneakers n’aura aucune culture même si il a des paires ultra rares….. Je parlerai donc plus de connaissances. Pour moi c’est principalement savoir d’où vient le modèle, et qui à fait quoi avec ces chaussures de sport, parce que la base ce n’est pas le running pour moi, la base c’est simplement le sport sous toute ses formes, dans son ensemble, et c’est vaste donc je me cantonne au basket ball, car c’est ce qui a marquée ma génération. Je ne peux pas te donner le nom d’un marathonien mais je peux te dire que Jordan portait des Huarache Black purple en 92 le jour de la remise du titre NBA des Bulls. S’intéresser à une Pump, une Air Tech Challenge c’est savoir ce qu’en a fait l’athlète, ses performances, et c’est ça qu’y en fait un classique depuis 30 ans, et qu’on peut appeler culture.
Le Hip Hop et basket-ball ont toujours été des univers très fusionnels en ce qui concerne la sneakers ? Comment expliques-tu la génèse de ce phénomène ( cette transversalité) ?
La réussite, la compétition, se démarquer, la performance, la rue, sont les éléments qu’on retrouve dans le basket ball et le HipHop. La culture afro Américaine à toujours été portée par des vagues musicales, soul, Funk, Rap, cette dernière depuis l’avènement du basket moderne est la plus présente dans les tournois, les vidéos, et les événements comme le Hall Star Game. On avait des marching Bands pendant la mi temps dans les 90’s, on a évolué vers des medleys de super stars, je vois mal un groupe de métal y faire un show et on ne m’a jamais demandé de passer de la house pendants un 3×3. Il faut peu d’infrastructure pour jouer au basket, tu peux t’entrainer seul au shoot au dribble etc… comme dans les discipline du HipHop, il est rassembleur, politique, et établie dans la culture américaine. Le rebond du ballon, c’est comme le tempo, c’est un rythme qui frappe, parfois lent ou rapide. Rajoutons à tout ça le merchandising incroyable des clubs, les logos et les couleurs qui ont influencé sur le street wear. Afficher ses couleurs, des signes d’appartenances et de distinctions, avec une paire de Air Force One, Jordan, Pump, Ewing, Puma, Converse, portés par des leaders de la NBA, pour les Rappeurs, c’est aussi un symbole de réussite, comme un bling ou une belle veste.
Pourquoi un tel engouement autour de la Sneaker aujourd’hui ? Comment vois-tu le marché actuel de la sneaker ?
Pour moi deux choses sont des facteurs évidents, la Hype forcement, et on peut en débattre des heures, mais ce n’est pas pour moi l’élément le plus intéressant car il n’est pas spécifique à la sneaker mais à la consommation dans son ensemble. Je pense que c’est surtout le pouvoir d’achats des personnes qui ont grandi dans les années 80 90, qui ont maintenant un job et des revenues. De deux ou trois paires par ans pour les plus chanceux à l’époque, aujourd’hui certain sont même prêts à faire des crédit à la consommations ou se servir de leurs aides sociales pour en acheter cinq par mois. Chacun est le mouton et le berger d’autrui et forcement ça créé des tendances, surtout chez les plus jeunes. Le souvenirs est un facteur économique important pour les marques, chaque rééditions de modèles classiques est quasi un succès. Ce marché pour moi ne s’estompera jamais, c’est une boucle, dans 15 ans Nike ressortira encore des VI infra et très certainement des Kiri, KD et Lebron, les débats seront les même au sujet de la couleur, le feu est sans cesse ravivé.
Es-tu plus sélectif qu’avant ou achètes-tu sur des coups de tête ou des coups de coeur ? Te considères-tu comme un sneaker addict ? Ce terme est à la mode, qu’en penses-tu ?
Les OG c’est bien mais Il faut savoir vivre avec son temps, les mélanges de matières et les nouvelles technologie apportent un confort et une légèreté incomparables, je me vois plus faire un match avec des Lebron XI qu’avec mes Nike Command Force White Men Can’t Jump ou des Jordan V. J’aime beaucoup les dernières releases et déclinaisons des Air Max 90, 95, la 2015 est magnifique, dans la gamme Lebron aussi, on a eu des choses dingues visuellement comme les Sprites, les Cork, South beach, Denim. Les nouveaux modèles et coloris sont très intéressants, mais parfois bien moches aussi, après c’est le principe des gouts et des couleurs qu’on utilise à outrance pour clore des débats sans fin. Mais à un moment donné c’est indéniables, pour moi par exemple, ce que fait Jeremy Scott c’est vraiment dégueulasse. Les collaborations autour de la hype ne m’intéresse pas vraiment, la Yeezy 1 et 2 elles sont cool, elles ont du charme ok, mais concrètement Kanye West je m’en fou, c’est comme les L.A. Gears de Michael Jackson à l’époque, ou des shoes de chez Z avec l’effigie de Lorie, ça ne représente rien pour moi en terme de sneakers, c’est du happy meal, ça pourrait être n’importe qui d’autre d’ailleurs en généralisant, mais pas tout le temps cela dit c’est sur, car les AF1 signature de DJ Premier, Booba par exemple, sont d’une sobriété et qualité surprenantes mais comme on le disait avant, HipHop et AF1 sont liés d’une histoire. Ensuite les stylistes, ou designers comme Ronnie Fieg, (je ne sais même qui c’est d’ailleurs) leurs visions, la mode de plumeau, ce qui touche à ce milieu, je préfère rester loin de tout ça, et c’est pour ces raisons que je ne suis pas vraiment un sneakers addict car je m’intéresse pas a toute cette tangente, n’étant pas réellement attiré ou impliqués par une mode qu’une personne détermine. La mode ça se démode.
Le mot de la fin ?
Tout d’abord un grand merci à toi pour cette invitation dont je suis assez fier, remerciement à Cedric Sintes pour les photos qui illustrent cet article. Un big up aux personne d’un peu partout avec qui j’ai sympathisé par le biais de cette passion, on rencontre un paquet de cons mais on se fait aussi des amis. Ne vous prenez pas la tête, ce ne sont que des chaussures de sport, d’autres font des maquettes ou collectionnent des pin’s, un bien matériels ne remplacera jamais le vécu, porter les, faites vous plaisir, rappelez vous bien que vous n’êtes jamais le seul à les avoir et quand bien même ce ne sera jamais un aboutissement ou une marque de respect éternelle.
Crédit photos: Cédric Sintes
S.A